C’est par la sensibilité que l’art prend vie avec l’artiste, d’une part, et se communique, touche les spectateurs, d’autre part. L’art, par cette qualité d’expression sensible, est un domaine privilégié pour communiquer des idées qui, elles-mêmes, parlent à la sensibilité de chacun.
Il est certain que la question de l’écologie et l’urgence nécessaire de la prise de conscience de l’irrévocabilité de nos actions fait appel, au-delà de nos consciences, à notre sensibilité individuelle et collective.
C’est alors que, aussi futile que cela puisse paraître, seule une production qui ne détruit pas, une production qui finalement ne produit rien d’autre que cet éveil des consciences et des sensibilités, est légitime à parler de ces questions. Cette production est la production artistique. L’artiste, sans prendre la place du politique, peut lui aussi faire entendre sa voix, à sa mesure, dans son domaine. Seul l’art peut toucher et sensibiliser sans basculer dans le prosélytisme ou la propagande. Car le risque est grand. L’enfer est pavé de « bonnes intentions » et la récupération guette toute démarche qui part d’un « bon sentiment ».
L’art pour sensibiliser, oui certes c’est une chose, mais l’art peut également se révéler plus utile que futile et apporter un moyen d’expression actif à toutes ces sensibilités activées et ces consciences éveillées. Car si le temps de la sensibilisation reste nécessaire, il semble pourtant dépassé. La sensibilité écologique est du côté du peuple, des citoyens, des gens. On assiste à un décalage entre ces sensibilités individuelles et les décisions des dirigeants des puissances économiques. Le peuple est en avance sur ses représentants. Ce décalage, au-delà d’être profondément alarmant, attristant, décevant, est extrêmement dangereux. Bien évidemment, cette situation est dangereuse de manière immédiate, en ne tenant pas compte, d’un point de vue tout à fait pragmatique, des urgences d’action. Mais ce décalage entre le ressenti d’un peuple et les décisions de ses dirigeants est également le terreau d’une violence latente qui se nourrira et explosera de toutes ces incompréhensions. La soif de changement guidera la marche de cette révolution verte qui, comme d’autres révolutions avant elle, si elle n’est pas mûrie et menée par l’écoute et le bon sens, pourrait risquer l’appel des extrêmes, de ceux qui se présenteraient, opportunistes hypocrites, comme « les seuls à avoir le courage d’assumer les responsabilités d’un réel changement ! ».
Aussi, pour ne pas que cette « révolution verte » se transforme en « dictature verte », il est plus qu’important et vital que ce changement de paradigme qui est appelé de nos vœux à tous se fasse aux côtés de la culture et de l’art dans une écoute et un respect de chacun, où les cultures et les peuples s’allient pour un enjeu qui nous dépasse tous et qui, pourtant, dépend de nous.
Julie Cloarec-Michaud